Dans les salles d’attente ou aux guichets des entreprises de service, des administrations, des hôpitaux, dans les transports en communs, etc., les clients et usagers font de plus en plus souvent preuve d’incivilités à l’encontre des employés. Et même au sein de l’organisation elle-même, entre collègues, près de la moitié des employés se plaignent d’incivilités. Or l’incivilité doit être comprise comme une des formes que peut prendre la violence au travail, c’est une forme de risque psychosocial.
L’incivilité n’est définie dans aucun texte juridique. Elle correspond à un manque de respect, un manque de courtoisie, de politesse ou un comportement qui enfreint manifestement les règles de la vie sociale.
Une incivilité peut prendre la forme de violence verbale ou d’un comportement inapproprié, agressif ; en résumé, c’est tout ce qui va à l’encontre du vivre ensemble.
Si ce n’est pas encore le cas en Suisse, des enquêtes ont été conduites en France sur le thème des incivilités au travail, notamment en 2014 puis en 2015, par Eléas, un cabinet spécialisé, à la demande de l’Assemblée nationale.
L’enquête de 2014 relève que les 5 principales incivilités mal vécues entre collègues sont :
- Laisser les espaces communs sales et en désordre,
- Gêner la concentration des autres collègues par des bruits,
- Ne pas dire bonjour ni au revoir,
- Couper ou accaparer la parole sans tenir compte des propos d’un autre collègue,
- Arriver en retard en réunion sans s’excuser.
… et que les principales incivilités provenant de clients, usagers ou visiteurs sont :
- Ne pas attendre son tour et / ou ne pas respecter la file d’attente,
- Gêner d’autres visiteurs et se croire tout permis,
- Ne dire ni bonjour ni au revoir,
- Faire preuve d’irrespect par le regard ou la voix,
- Le fait de tutoyer sans réciprocité.
Quant à l’enquête conduite en 2015, elle souligne en particulier que les métiers les plus exposés aux incivilités sont ceux où les employés travaillent à un guichet ou à l’accueil, dans un commerce, ou dans les services non marchands, comme l’éducation, la santé, l’action sociale et l’administration.
Les conséquences de cette exposition aux incivilités sont le stress et l’anxiété qui peuvent conduire à de la démotivation, des absences répétées voire à des congés maladie de longue durée.
Pour éviter ces atteintes insidieuses à la santé physique et psychique des travailleurs, l’employeur doit prévenir la violence au sein de son entreprise, ne doit pas tolérer les incivilités entre collaborateurs et tout mettre en œuvre pour que ses employés ne soient pas victimes d’incivilités de la part de clients ou d’usagers. Il s‘agit d’instaurer une véritable culture de la sécurité au sein de l’entreprise, de prendre en compte l’ensemble de l’organisation de l’entreprise afin que le collaborateur ne s’entende pas dire, quand il a été victime d’incivilités : « tu n’as pas fait ce qu’il fallait, c’est ta faute, etc. »
Cette culture sécurité comporte toujours 3 phases : prévention, action, postvention.
La prévention de la violence au travail pourra concerner les locaux, la mise en place d’alarme afin de sécuriser les locaux, en cas d’agression, etc.
Un comptoir d’accueil peut-être sécurisé, surélevé, muni d’une vitre, afin que l’employé se sente davantage en sécurité, moins exposé aux violences des usagers.
De même, des services d’urgence dans les hôpitaux ont par exemple créé des salles de repos pour les soignants des urgences, loin des regards des patients qui attendent, car les soignants se faisaient sinon agresser verbalement, les patients ne comprenant pas que les employés des urgences prennent une pause de temps en temps…alors qu’il y avait beaucoup de personnes qui attendaient pour la consultation.
Il est également important que l’entreprise rappelle par écrit et diffuse à sa clientèle qu’elle ne tolère pas les incivilités.
Ces employés en contact avec le public doivent également être formés au désamorçage des conflits puisqu’il y a des personnalités difficiles parmi les clients et usagers, mais ce dispositif ne suffit pas à lui seul.
La postvention analyse ce qui s’est passé et détermine où est-ce qu’il y a du potentiel d’amélioration. Il faut donc instaurer une procédure de déclaration des incivilités et de toute autre forme de violence.
Ce n’est que dans cette démarche proactive et globale que les employés seront le mieux protégés contre les incivilités.
LEC/Mai2019